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Pir-o-Murshid Hazrat Inayat Khan


Suggestion
Pir-o-Murshid Hazrat Inayat Khan


 

Les couleurs et les formes nous suggèrent automatiquement une pensée ou un sentiment. Les couleurs que l'on porte et les couleurs qui nous entourent ont un effet sur notre personne et produisent une atmosphère. Il m'arriva un jour d'aller dans un club nouvellement créé, et quelques membres de ce club me dirent: «Il y a certainement un esprit malveillant dans cette maison, car depuis que nous y avons notre club, chaque fois que nous tenons une réunion du comité, il y a un conflit.» Je leur fis remarquer les murs de la pièce où ils avaient l'habitude de tenir ces réunions: ils étaient recouverts d'un papier rouge. Je leur dis: «C'est le papier rouge! Il fait appel au côté fougueux de votre nature, et s'il y a la moindre tendance au conflit, cela vous encourage à la dispute.»

 

Les anciens ordres des sages, des saints, des gens contemplatifs avaient cette idée dans l'esprit, et selon cette idée, ils composaient les couleurs de leur habillement et la couleur de leur environnement. Comme l'on néglige aujourd'hui cette idée, l'on prend n'importe quelle couleur à la mode de la saison, dans l'ignorance de ce qu'elle suggère à soi-même et aux autres.

 

Et de même en est-il de la forme des objets; si un objet est bien formé, il suggère le rythme et l'harmonie, et s'il est tordu, il en suggère l'impression.

 

Il existait, dans les anciens temps, la superstition d'un bon ou d'un mauvais présage. C'était basé sur ce principe; car chaque couleur suggérait à celui qui était sur le point d'accomplir un travail s'il allait rencontrer le succès ou s'il allait échouer. La couleur le suggère. L'impression qu'il recevait de cette couleur l'accompagnait à ce point qu'elle avait son effet sur son travail. Il y avait aussi la superstition que si vous rencontriez une personne contrefaite en allant accomplir un travail quelconque, c'était de mauvais augure. Et cela ne s'applique pas seulement aux personnes, mais à quoi que ce soit de tordu que vous rencontrez en vous préparant à faire une chose, ce qui donne naturellement à votre esprit une impression tortueuse. Tout le monde n'a pas la connaissance des traits, mais chacun est affecté par les traits. Il en reçoit une impression sans même le savoir. Pourquoi? Parce qu'une forme suggère quelque chose que tout le monde ne peut pas décrire, mais que tout le monde ressent. C'est un langage sans paroles; il vous communique quelque chose, bien que ce ne soit pas toujours facile pour chacun de l'interpréter, fut-ce pour lui-même.

 

Toute petite douleur ou petit malaise persiste souvent par la puissance de la suggestion. Aussitôt que l'on ressent malaise ou douleur, le mental répète: «Je souffre, je ressens un malaise», et cette suggestion donne une nourriture à cette douleur, comme un combustible pour du feu. Et il en est de même de la fatigue. Il arrive bien souvent que quelqu'un devienne fatigué avant de travailler parce que l'expérience que l'on a de la fatigue vous la suggère; avant d'avoir commencé le travail, l'on est fatigué. Et l'on peut trouver bien des cas dans le monde de gens qui sont fatigués parce qu'ils en ont l'impression dans leur mental, et cela vient sous forme d'une suggestion qui les rend fatigués. Il en est de même de la faiblesse. Une fois qu'une personne a reçu l'impression de sa propre faiblesse, de la faiblesse du corps, cela continue à travailler en elle. Cela vient comme une suggestion du dedans. Et si un bon ami vient pour l'aider en lui disant: «Vous avez l'air bien à plat», alors il est venu aider la faiblesse à continuer.

 

Et puis il y a un autre aspect de la suggestion. Il est très important. Cet aspect est une impression faite sur la conscience, disant «J'ai mal agi», «J'ai fait quelque chose d'injuste», ou «C'était au-dessous de ma dignité.» Sans doute cette impression est-elle due au bon côté de l'être de la personne, mais elle a souvent pour effet quelque chose de mauvais. Car ce qui arrive est que l'idée qui se présente en premier est «J'ai mal agi» et qu'ensuite le temps qui passe émousse ce sentiment qui s'élevait contre le mal, et l'on commence à le supporter, et puis, pour finir, on pense que tout va bien. Pourtant l'impression de: «Je l'ai fait» reste, et elle continue en vous faisant agir de plus en plus mal.

 

Quelqu'un qui a été mis en prison continue très souvent à aller en prison, persiste dans le même délit; et cet esprit qui s'y opposait s'est émoussé. L'on est maintenant à la fois habitué à son délit et à la punition. En d'autres termes, ils sont devenus maîtres de la situation; cet individu continue alors à faire la même chose.

 

Nous voyons cela aussi chez les enfants. Si un enfant a reçu l'impression de quelque chose qu'il a fait et qui est bien, et que vous l'admiriez, dont vous dites que c'est très bien, ou si l'enfant sent lui-même: «C'est très bien ce que j'ai fait», cela continue à travailler en lui, et l'enfant, grâce à cela, s'améliore chaque jour.

 

C'est en reconnaissant le pouvoir de la suggestion que les peuples anciens donnaient à leurs enfants des noms dont le sens devait leur suggérer le sentiment qui y était attaché. Naturellement, si une personne entend son nom prononcé cent fois par jour par les autres, elle en reçoit cent fois une suggestion. Elle peut peut-être ne pas s'en rendre compte sur le moment, mais le plus intime de sa conscience reçoit cette suggestion, et elle développe cette qualité, car telle est la nature de l'âme.

 

J'ai eu à m'intéresser à une personne dont le nom signifiait quelque chose comme «torture»; en l'interrogeant sur sa vie, j'ai constaté à la fin que c'était en effet une torture. Il y a beaucoup de gens qui donnent des noms sans y penser et qui ne veulent rien dire, ce qui n'aboutit à rien. Dans le nom il y a une suggestion automatique. L'on s'entend appeler par ce nom un certain nombre de fois par jour et cela produit le sentiment de ce nom, non seulement dans la propre conscience de la personne en cause, mais encore chez ceux qui l'appellent par ce nom; dans leur esprit, un sentiment s'est aussi automatiquement élevé, et l'ensemble travaille au bénéfice de cette personne.

 

Aucune suggestion n'est plus puissante qu'une impression profonde faite sur quelqu'un par son propre succès ou par son propre échec, par la bonne ou par la mauvaise chance, par la tristesse ou par la joie. Et c'est très grande pitié lorsqu'une personne est profondément impressionnée par sa propre indignité. Imaginez, quand cette impression continue, où cela la mène? Cela la mène à une indignité complète. Et naturellement elle sera indulgente envers elle-même. Et cet aspect de sa nature qui doit s'y opposer s'émoussera, et le résultat en sera l'impuissance.

 

 

 

Question: J'ai horreur de mon nom, cela me fait mal de l'entendre.

Réponse: Hé bien, il aurait dû être changé il y a longtemps. Et pourtant il n'est jamais trop tard. Il vaut mieux le changer et oublier le nom du passé.

 

Question: Comment un père ou une mère sauraient-ils comment appeler leur nouveau-né pour l'aider dans la vie?

Réponse: Le monde connaît si mal cette idée! Plus elle sera connue, plus les gens en connaîtront la valeur, car il n'y a rien au monde qui puisse apporter une plus grande suggestion à une personne que son propre nom, puisqu'elle est constamment appelée de ce nom par les autres. Et ceux-là devraient être reconnaissants qui, en commençant à la comprendre, peuvent répandre cette idée parmi leurs amis.

 

Question: Est-ce que les gens en Orient ne sont pas plus facilement sujets à la suggestion que dans l'Occident plus matérialiste?

Réponse: Je pense que la nature humaine est telle qu'elle est toujours sujette à la suggestion, que ce soit en Orient ou en Occident, mais cela dépend. D'ailleurs ce n'est pas la faute de l'homme s'il est «suggestionnable». Un homme qui n'est pas sujet à la suggestion n'est pas normal. S'il ne reçoit pas de suggestions de l'extérieur, alors il reçoit la suggestion du dedans; et qui sait si les suggestions du dedans sont toujours les meilleures? Ceux qui prétendent rejeter les suggestions sont encore dans une plus grande erreur que ceux qui les reçoivent. Il ne s'agit pas de recevoir des suggestions ou de les rejeter, il faut comprendre quel est son propre bénéfice; il faut comprendre ce qui sera bénéfique et ce qui jouera à notre détriment. Celui qui ne peut être son propre ami ne peut être l'ami d'un autre. Quelqu'un qui est son propre ennemi se montrera toujours comme l'ennemi de ses meilleurs amis. C'est la compréhension de l'idée qui est nécessaire.

 

Question: Pouvez-vous tout surmonter par la suggestion?

Réponse: On peut le faire, mais on ne peut pas le dire. Il y a beaucoup de très grandes choses, et pourtant elles peuvent être accomplies. Mais quand vous commencez à les dire, c'est trop difficile à exprimer. Ce ne sont pas les autres qui ne les comprendront pas, mais vous-même qui ne pourrez pas les croire quand vous commencerez à les dire. Mais quand cela reste inexprimé, de plus grandes choses peuvent être accomplies que notre imagination n'en peut concevoir.

 

Question: Comment peut-on éloigner une mauvaise suggestion de son propre mental?

Réponse: C'est une lutte, et cela demande que la personne connaisse la manière de lutter. Sinon, en luttant, une personne continuera par cette lutte même la même suggestion. Par exemple, une personne lutte contre sa maladie et se dit à elle-même: «Je ne suis pas malade, je ne suis pas malade», ces deux mots sont là et elle les continue tous les deux. Elle reçoit autant la suggestion de «malade» que de «pas»! Par conséquent, on doit connaître la manière judicieuse d'employer la suggestion. Ou bien quelqu'un qui est dans la pauvreté, qui dit: «Je ne suis pas pauvre»; mais «pauvre» est là; à coté du  «pas», il y a «pauvre», et sa pauvreté persiste; tandis qu'il lutte, il garde devant lui la chose contre laquelle il lutte. Bien qu'il ne la veuille pas, la chose est pourtant là, dans sa propre conscience, et il ne peut s'en débarrasser.

 

Question: S'il y a une personne qui a peu de croyance dans la vie, et que vous lui donniez un nom qui suggère la croyance, cela peut-il l'aider?

Réponse: Si elle y croit.

 

 

Question: N'est-il pas vrai que la personne dont le nom était «torture» avait la torture dans sa vie, ce qui induisit ses parents à lui donner ce nom?

Réponse: C'est vrai. Cela forçait d'une certaine façon les parents à lui donner ce nom, c'est vrai. Mais, même cela, il est souhaitable de l'éviter. Il est vrai que pour le nom qui est donné à un enfant, si une personne qui le donne n'est pas inspirée, alors un mécanisme automatique des forces cosmiques suggère à cette personne de donner ce nom particulier, et ce nom construit la destinée de cet individu.

Cependant cela a été le travail des grands mystiques de donner de meilleurs noms pour produire des résultats meilleurs. Et j'ai moi-même vu quelques personnes auxquelles un sage, un mystique avait donné un nom alors qu'il était dans un moment de profond sentiment, un nom qui sortait de son cœur; et ce nom, du jour où il avait été donné, avait changé la destinée entière de ces personnes. Le pauvre devint riche, le sot devint sage, l'insignifiant devint fameux, important, grand. Ce n'est pas imaginaire, cela a été ma propre constatation en des occasions où des gens ont reçu un nom comme une bénédiction de la part d'une personne spirituelle, et leur vie entière s'est trouvée changée. Nous savons si peu du pouvoir du nom. Mais plus on l'étudiera, plus on saura que le nom peut avoir une très grande influence sur la vie d'une personne.

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L'influence de la couleur

 

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