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Pir-o-Murshid Hazrat Inayat Khan


LE BUT DU VOYAGE
La Vie Intérieure
Chapitre 2
Pir-o-Murshid Hazrat Inayat Khan


Texte original en anglais

Dans la Vie Intérieure, la chose première et principale est d'établir un lien avec Dieu, en faisant de Dieu l'objet auquel nous nous relions, le Créateur, le Soutien, Celui qui pardonne, le Juge, l'Ami, le Père, la Mère, le Bien Aimé. Dans chaque relation il faut placer Dieu en face de soi, et devenir conscient de ce lien, afin qu'il ne reste pas une imagination, car la première chose que fait le croyant est d'imaginer. Il s'imagine que Dieu est le Créateur, il essaie de croire que Dieu est le Soutien, il fait un effort pour penser que Dieu est un Ami, et il cherche à sentir qu'il aime Dieu. Mais lorsque cette imagination devient une réalité, il doit ressentir pour Dieu sympathie, amour, attachement, tout comme un bien-aimé sur terre. Sans ce lien, si profondément pieuse, bonne ou droite que soit une personne, sa piété ni sa bonté ne sont une réalité pour elle.

 

La tâche de la vie intérieure est de faire de Dieu une réalité afin qu'Il ne soit plus une imagination, afin que cette relation de l'homme à Dieu lui semble plus réelle qu'aucune autre relation dans ce monde. Et quand il en est ainsi, toutes relations, si proches et si tendres soient-elles, deviennent moins attachantes; cela ne signifie pas que le cœur se refroidisse; il devient plus aimant. C'est l'homme sans Dieu qui est froid, influencé par l'égoïsme et le manque d'amour qui sont la condition dans laquelle il vit dans le monde. Mais celui qui aime Dieu, celui qui a établi une relation avec Dieu, son amour devient vivant; il n'est plus froid; il remplit ses obligations dans le monde beaucoup mieux que ne fait l'homme sans Dieu.

 

Considérant maintenant la manière d'établir cette relation avec Dieu, et le choix de la relation qu'il est le plus désirable d'établir, comment faut-il se représenter Dieu: comme Créateur, comme Juge, Comme Celui qui pardonne, comme Ami ou comme Bien-Aimé?

 

La réponse est que, dans chaque circonstance de la vie, il faut donner à Dieu la place que le moment réclame. Lorsque, brisé par l'injustice, la froideur du monde, l'homme voit en Dieu la perfection de la justice, il n'est plus agité, son cœur n'est plus troublé, il trouve sa consolation dans la justice de Dieu. Il place devant lui Le Dieu Juste, et il apprend ainsi la justice. Dans son cœur s'éveille le sens de la justice et il voit la vie dans une tout autre lumière. Quand il rencontre ici-bas l'orphelin de mère ou de père, il sait qu'en Dieu sont la mère et le père et que, même s'il était en présence de la mère et du père, ces liens ne sont que terrestres. La Maternité et la Paternité de Dieu sont le seul lien réel. La mère et le père terrestres ne font que refléter une étincelle de cet amour maternel et paternel qui, en Dieu, est parfait. Alors, l'homme se rend compte que Dieu peut pardonner comme les parents peuvent pardonner à l'enfant qui est en faute. Alors, l'homme sent la bonté, la bienveillance, la protection, l'aide, la sympathie, venir de partout, et il apprend à sentir que cela vient de Dieu, le Père-Mère à travers tout. Quand l'homme se représente Dieu comme Celui qui pardonne, il voit qu'il n'y a pas dans ce monde qu'une stricte justice, mais que l'amour s'y développe aussi, qu'on y rencontre la miséricorde et la compassion, qu'il y a cette tendance de pardonner; que Dieu n'est pas le serviteur de la loi, comme l'est ici-bas le juge, mais qu'Il est le Maître de la loi: Il juge quand Il juge, quand Il pardonne, Il pardonne. Il a ces deux pouvoirs, Il a le pouvoir de juger et Il a le pouvoir de pardonner. Il est juge parce qu'Il ne ferme pas les yeux sur tout ce que fait l'homme. Il sait, Il pèse et mesure, et Il rend à l'homme ce qui lui est dû. Et Il est Celui qui pardonne parce que par delà et au-dessus de Son Pouvoir de justice est Son grand Pouvoir d'Amour et de Compassion qui est Son Être même, qui est Sa propre Nature et qui, par conséquent, dépasse Son Pouvoir de justice en étendue et en action. Nous, les humains de ce monde, s'il y a une parcelle de bonté ou de bienveillance dans notre cœur, nous évitons de juger nos semblables; nous aimons mieux pardonner que juger. Le pardon procure naturellement une joie plus grande que la vengeance, à moins qu'on ne soit sur un tout autre chemin.

 

Celui qui se représente Dieu comme un Ami n'est jamais seul dans le monde, ni ici-bas, ni dans l'Au-delà: il y a toujours un ami pour lui, un ami dans la foule, un ami dans la solitude; qu'il soit endormi, inconscient de ce monde extérieur ou bien éveillé et conscient, dans les deux cas l'ami est là, dans sa pensée, dans son imagination, dans son cœur, dans son âme. Et celui qui fait de Dieu son Bien-Aimé, que peut-il souhaiter de plus? Son cœur s'éveille à toute la beauté intérieure et extérieure. A lui, tout parle, tout se dévoile, et c'est beauté à ses yeux, parce que Dieu pénètre tout, Il est dans tous les noms et dans toutes les formes; son Bien-Aimé n'est donc jamais absent. Combien est heureux celui dont le Bien-Aimé est toujours présent, car toute la tragédie de la vie est l'absence du Bien-Aimé. Pour celui de qui le Bien-Aimé est toujours là, s'il ferme les yeux le Bien-Aimé est au-dedans, s'il les ouvre le Bien-Aimé est au-dehors. Chacun de ses sens perçoit la présence du Bien-Aimé: ses yeux Le voient, ses oreilles entendent Sa voix. Quand une personne parvient à cette conscience, elle vit, pour ainsi dire, dans la présence de Dieu; alors, les cultes variés et les diverses croyances, les différentes confessions et les communautés, ne comptent pas. Pour elle, Dieu est tout en tout; pour elle, Dieu est partout. Soit qu'elle aille à l’Église chrétienne, à la Synagogue, au Temple bouddhiste, au Sanctuaire hindou ou à la Mosquée des Musulmans, Dieu est là. Au désert, dans la forêt, dans la foule, partout elle voit Dieu.

 

Ceci montre que la vie intérieure ne consiste pas seulement à fermer les yeux et à regarder au-dedans: la vie intérieure consiste à regarder au-dehors et au-dedans et à retrouver partout Son Bien-Aimé. Mais pour que Dieu soit le Bien-Aimé, il faut que l'élément "amour" soit suffisamment éveillé. Celui qui hait son ennemi et aime son ami ne peut appeler Dieu Son Bien-Aimé, car il ne connaît pas Dieu. Quand l'amour atteint sa plénitude, alors on a de l'affection pour son ami, de la miséricorde pour son ennemi, de la sympathie pour l'étranger. Quand l'amour atteint sa plénitude il s'exprime dans toutes ses formes, et c'est la plénitude de l'amour qu'il vaut la peine d'offrir à Dieu; c'est le moment où l'homme reconnaît en Dieu son Bien-Aimé, son Idéal, et c'est alors que, bien qu'il s'élève au-dessus des affections étroites de ce monde, en réalité il est celui qui sait aimer même son ennemi. C'est l'amant de Dieu qui connaît l'amour, quand il s'élève à la hauteur de la plénitude de l'amour.

 

Toute la langue imagée de la littérature soufie en langue persane, celle des grands poètes, tels que Djalal-ud-Din-Roumi, Hafiz et Jami, évoque les relations entre l'homme amant et Dieu le Bien-Aimé. Quand on lit ces poèmes en en comprenant le symbole, et après avoir développé dans son cœur cette même relation avec Dieu, alors on comprend les images de la littérature mystique, et à quelle note les mystiques ont accordé leur cœur. Il n'est pas facile de cultiver l'amour de Dieu dans son cœur, parce que, quand on ne voit pas l'objet de son amour ou qu'on n'en est pas conscient, on ne peut aimer. Dieu doit devenir tangible pour qu'on puisse L'aimer; or, une fois qu'on est arrivé à aimer Dieu, on a vraiment commencé le voyage sur le sentier spirituel.

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La Vie Intérieure L'accomplissement des obligations
de la vie humaine
Le pardon L'amour

 

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