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Murshida Sharifa Lucy Goodenough


LA PURETÉ

Murshida Sharifa Lucy Goodenough


 

La pureté est l’état naturel d’une chose ou d’un être, l’état où cette chose ou cet être existe dans sa propre essence sans que rien n’y soit mêlé. Une eau pure est une eau à laquelle rien n’est mêlé. L’état pur de l’âme est l’état où l’âme existe dans son essence sans que rien qui vient du dehors n’y soit mêlé. C’est pourquoi devenir pur signifie devenir naturel. Devenir naturel, c’est devenir spirituel, c’est enlever tout ce qui est extérieur à l’esprit, c’est le purifier, le rendre lui-même. 

 

Très souvent dans les écritures ésotériques et dans les écrits des Soufis, il est question de pureté de la conscience, de la vie pure, et très souvent on interprète ce mot pur, pureté dans divers sens. On dit pur en voulant dire le contraire de ce qui est mauvais, ou bien pur de pensée, de sentiment, d’émotions, ou bien pur de ce que représentent les ombres de l'ego. Mais pur employé dans le sens ésotérique ne veut dire aucune de ces choses. Pur veut dire naturel. Ce n’est pas seulement n’ayant aucun attribut indésirable ou mauvais, mais n’ayant aucun reflet de l'ego. La conscience pure, l’âme pure, n’ayant aucune trace d’émotion, de sensation, d’impression, est comme un miroir dans lequel rien n’est reflété ou comme une eau qui n’a pas de couleur, pas de saveur, qui ne reflète rien, pas même le ciel, une eau qui n’est ni verte, ni blanche, qui est transparente. Tel est l’état de l’âme pure qui, au moment de sa pureté, n’a aucune qualité et ne reçoit aucune impression. 

 

On dit que la pureté est la condition nécessaire à la vie spirituelle ou pour entrer dans certaines sphères. Ce qui nous retient dans une sphère, c’est l’impression de cette sphère. Ce qui nous retient dans le monde physique, c’est l’impression du monde physique. Notre âme n’y est pas, notre corps y est. Notre âme reçoit des impressions qui font qu’elle s’oriente vers le plan physique, et quand elle est consciente du plan physique, elle croit être sur ce plan. Et pour qu’elle puisse entrer dans une autre sphère, elle doit se libérer de ces impressions. Dans les livres occultes ou mystiques des peuples anciens, il est souvent question de pureté, condition nécessaire à l’adepte qui avance d’un plan à l’autre. "Entre" lui dit-on, "passe, tu es pur". Ces mots ne signifient pas: "Tu es une belle âme", mais  "Tu as éloigné de toi certaines impressions. Cette pureté permet que tu entres dans les sphères supérieures". Ensuite, ce qui nous retient dans le monde mental, c’est l’impression sur notre âme de ce monde, notre préoccupation de tout ce qui est mental. Sinon, nous n’y serions pas. Et quand toutes ces impressions s’éloignent par le sommeil ou par une incapacité de l’esprit à les y maintenir, l’âme n’est plus dans la sphère mentale; elle est plus pure, elle retourne au-delà de la sphère mentale. Et cela signifie: "Passe, tu es pur". C’est pourquoi par la méditation l’âme se purifie, elle retrouve sa pure essence. Quand elle est devenue entièrement pure, l’âme est délivrée du moi limité, elle est la conscience pure. Cela signifie pour elle un bain qui a tout effacé, qui a rendu pures sa mémoire, sa conscience. C’est pourquoi le sommeil est purifiant. Un profond sommeil efface de notre conscience toutes les images, toutes les impressions qui s’y trouvaient, et au moment du réveil, nous trouvons une pureté qui n’y était pas quand nous nous sommes endormis. Le grand poète Roumi dit: 

"Chaque nuit, Tu nettoies les tablettes de notre esprit, 
Tu effaces tout ce qui y est écrit et notre esprit redevient pur".

 

Mais alors, pourquoi appelons-nous pure une âme qui semble ne connaître que l’amour, une conscience qui ne connaît que la lumière, une âme qui semble ne pas sentir l’envie, la jalousie, l’antagonisme, toutes les choses mesquines, toutes les choses troubles et basses qui peuvent jeter leur reflet sur le cœur humain, une conscience sans ombre? C’est que l’amour est la première nature de l’homme, et quand cet amour dévie, quand il devient un amour de soi concentré sur notre petite personne, les ombres s’élèvent, car cet amour limité empêche le plein développement de l’amour et crée des ombres que nous appelons haine, préjugé, antipathie et ainsi de suite. Et aussi tout ce qui obscurcit l’esprit, tout ce qui est ombre, le plus souvent projeté par l’ego, enlève à l’âme sa lumière qui est sa nature première. Donc, si ces ombres n’existent pas, le cœur et l’âme redeviennent purs. Et c’est pourquoi un cœur aimant est un cœur pur, une conscience lumineuse est une conscience pure, et nous le reconnaissons sans qu’il y ait besoin de raisonnement.

 

Le dévoilement de l’âme suffit-il, à lui seul, pour rendre à l’âme sa pureté? Certainement. Mais le dévoilement de l’âme est-il chose possible, l’âme peut-elle retourner à sa première nature? Certainement oui, quoique cela puisse demander de la persévérance et de longs efforts. C’est là la seconde naissance de l’homme. Nous naissons avec ce petit ego, notre compagnon de route toute notre vie. Il projette son reflet sur notre âme. La tranquillité parfaite de l’esprit, la sérénité absolue suffiraient-elles à elles seules pour rétablir la pureté de la conscience? Certainement oui, mais il est difficile d’y arriver. Nous sommes constamment en mouvement. Notre esprit est comme une eau qui n’est jamais immobile. Il se meut, et son mouvement crée en lui une substance dense. C’est pourquoi le Soufi emploie deux moyens pour arriver à la pureté de l’âme. Il cherche à tout moment à développer en lui l’amour, il cherche à arriver à une pureté parfaite. Et ces deux choses, il les pratique dans la vie et dans la méditation. 

 

Toutes les voies mènent à un seul but, mais il y en a de plus longues et il y en a de plus courtes, il y en a de plus difficiles et de plus faciles. Le Soufi choisit la voie la plus facile, celle de l’amour. Il choisit la plus courte en suivant les pas de ceux qui l’ont précédé sur ce chemin. Il reçoit leur aide, il reçoit leur lumière. Il n’est jamais seul. Une main secourable est toujours là pour l’aider. Il cherche à développer en lui l’amour, d’abord par la tolérance, ensuite par une considération, à tout moment de la journée, de ne pas blesser autrui, de ne pas causer une souffrance, même légère, à qui que ce soit, et il accepte avec patience tout ce qu’il rencontre: affronts, indifférence, incompréhension; il apprécie hautement la sympathie, la bonne volonté des autres à son égard. Voilà ce qu’il cherche à accomplir dans la vie. Et il se réserve quelques moments de la journée dans lesquels il nettoie le miroir de son esprit, de son cœur. Il le frotte pour enlever les taches qui s’y trouvent, et quand ce miroir est pur, il le tourne vers la Lumière Divine qui alors l’illumine. Quand il est arrivé à ce point, le but de sa voie de purification est atteint. A ce moment, il est tout et il n’est rien. Soufi veut dire "saf", pur, pur des distinctions et des différences.

 

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